jueves, 22 de marzo de 2012

Le cauchemar mexicain
de Florence Cassez

De notre envoyé spécial à Mexico, Frédéric Faux Mis à jour | publié

Florence Cassez, 33 ans, et Israel Vallarta, en décembre 2005, le jour de leur arrestation spectaculaire. La Française, reconnue coupable d'enlèvements par la justice mexicaine, se dit innocente et a demandé l'aide de la France.
Florence Cassez, 33 ans, et Israel Vallarta, en décembre 2005, le jour de leur arrestation spectaculaire. La Française, reconnue coupable d'enlèvements par la justice mexicaine, se dit innocente et a demandé l'aide de la France. Crédits photo : SIPA

La Française, qui vient d'être condamnée à quatre-vingt-seize ans de prison, affirme être victime d'une histoire d'amour qui a mal tourné.

«Florence n'a pas abandonné la lutte, mais il faut la comprendre : elle est condamnée à quatre-vingt-seize années de prison, elle est encore sous le choc.» Jesus Horacio Garcia, l'avocat de Florence Cassez, est désolé, mais sa cliente ne peut pas encore recevoir de journalistes. Cette Française originaire de la région de Béthune, âgée de 33 ans, a été reconnue coupable par la justice mexicaine de quatre enlèvements, d'association de malfaiteurs et de possession d'armes. Si son appel est refusé, ou rejeté, elle ne devrait cependant purger que sa peine la plus lourde vingt ans dans une prison française.

Maigre consolation pour cette jeune femme qui crie son innocence et dont l'histoire est somme toute banale. Car quand Florence Cassez arrive au Mexique, en août 2003, c'est d'abord pour prendre des vacances. Son frère y a monté une entreprise quelques années auparavant, le pays lui plaît. Florence décide alors de s'installer à Mexico. Elle trouve du travail dans un grand hôtel de la capitale où elle rencontre Israel Vallarta, celui que la police présente aujourd'hui comme le kidnappeur en chef de la bande du «Zodiaque».

C'est à partir de ce moment-là que les versions divergent. La Française, affirme une partie de la presse mexicaine, n'était pas seulement la compagne d'Israel Vallarta. Cette «ravisseuse sanguinaire et diabolique» était aussi sa complice et n'hésitait pas à se servir de son travail pour repérer de futures victimes qui étaient ensuite enfermées dans le ranch d'Israel, à une cinquantaine de kilomètres de Mexico. Florence, répondent ses parents, n'a vécu que cinq mois chez le chef du Zodiaque et ignorait tout de ses activités criminelles… Souvent absent de son domicile, il se présentait comme un revendeur de voitures d'occasion.

Failles de l'accusation

La famille Cassez, jusqu'à la semaine dernière, était persuadée que ces éléments suffiraient à convaincre la justice, d'autant plus qu'Israel Vallarta a innocenté leur fille à plusieurs reprises. Elle comptait aussi s'appuyer sur les failles d'une accusation qui s'était ridiculisée dès l'arrestation, le 9 décembre 2005.

Ce matin-là, sur les deux plus grandes chaînes de télévision du pays, les Mexicains ont cru assister en direct au démantèlement de la dangereuse bande du Zodiaque. Florence et Israel sont appréhendés et la police libère trois otages devant les caméras. Le couple, qui venait de se séparer, n'a pourtant pas été arrêté le 9… mais le 8 décembre. «Les policiers les ont interceptés alors qu'ils déménageaient du ranch les affaires de Florence, expliquent ses parents. Notre fille n'a rien vu dans ce ranch, parce qu'il n'y avait rien à y voir : les soi-disant otages ont été amenés sur place au petit matin du vendredi 9 décembre. La police a installé toute une mise en scène faisant croire qu'ils vivaient là avec leurs ravisseurs… Ils avaient même monté des panneaux de contreplaqué !»

Cette arrestation spectaculaire, les autorités mexicaines l'ont reconnu par la suite, n'était donc qu'une simple reconstitution destinée aux télévisions. Aucun autre membre du Zodiaque, par ailleurs, n'a été retrouvé. «Et ce n'est pas tout, poursuit l'avocat Jesus Horacio Garcia. Les otages, qui au début n'impliquaient pas Florence, se sont mis soudainement à la reconnaître. On ne peut pas exclure qu'ils aient été soumis à des pressions… Les enlèvements sont devenus le problème de sécurité n° 1 du pays, les autorités avaient peut-être besoin de faire un exemple.»

Kidnapping express

Au Mexique, il suffit en effet d'être bien habillé ou de conduire une belle voiture pour constituer la cible de kidnapping express : ils ne durent que quelques jours et les sommes demandées entre 15 000 et 30 000 euros sont généralement à la portée des familles. D'autres otages sont également capturés dans des taxis pirates, dans le métro, sans oublier les kidnappings virtuels dans lesquels des parents versent une rançon après avoir reçu un appel désespéré mais totalement faux d'un de leurs «enfants». En 2006, plus de 600 enlèvements ont été officiellement recensés, mais les victimes qui se taisent seraient bien plus nombreuses. «Pour chaque otage que l'on connaît, il y en a trois qui restent cachés», assure José Antonio Ortega, du Conseil citoyen pour la sécurité et la justice pénale.

Ce contexte ne joue pas en faveur de Florence Cassez qui depuis sa prison de Mexico a demandé l'aide de la France : «Je vais crier mon innocence jusqu'au bout. J'ai besoin que la France se bouge, j'ai vraiment besoin que Nicolas Sarkozy écoute ma voix et qu'il mette le nez dans mon dossier», avait notamment déclaré la jeune femme sur la radio France Bleu Nord.

Les parents de la jeune femme, de leur côté, comptaient beaucoup sur la visite que Nicolas Sarkozy devait effectuer à la mi-mai au Mexique, avant que ce voyage officiel ne soit reporté pour des raisons d'agenda. «Florence est aujourd'hui extrêmement déçue, très en colère, et passablement déprimée, regrettent-ils… Son seul tort, finalement, c'est d'avoir fait confiance à un homme dont elle était amoureuse.»

La Cour suprême mexicaine refuse la remise en liberté immédiate de Florence Cassez

Le Monde.fr | • Mis à jour le

Photo de Florence Cassez, le 9 décembre 2005, à Mexico, après son arrestation.

Les cinq juges de la première chambre de la Cour suprême du Mexique n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur le sort de la Française Florence Cassez, mercredi 21 mars. Seule certitude : sa demande de remise en liberté immédiate a été rejetée, sans que la possibilité d'un nouveau procès soit écartée.

Arturo Zaldivar, juge rapporteur de son dossier, avait proposé la "libération immédiate et absolue" de la jeune femme, condamnée à soixante ans de prison pour trois enlèvements, association de malfaiteurs et port illégal d'arme. "Le contenu de la proposition n'ayant pas atteint le nombre de voix nécessaires, elle sera confiée à un autre juge" de la première chambre, a indiqué M. Zaldivar. Aucune date n'a été fixée pour une nouvelle audience.

"LE COMBAT CONTINUE"

Deux juges se sont prononcés pour sa libération, deux contre et un pour un procès en révision. Faute de position majoritaire, un nouveau rapporteur doit être désigné, qui rédigera une nouvelle proposition destinée à être soumise aux juges de la première chambre de la Cour suprême.

Lire le récit : "Florence Cassez, l'ultime espoir de liberté"

L'avocat mexicain de Florence Cassez, Agustin Acosta, a estimé que la position de la Cour, bien que défavorable quant à la libération, est "importante, parce qu'elle reconnaît qu'il y a eu des violations des procédures d'un procès équitable". "Je suis satisfait. J'aurais bien aimé une libération. Le combat continue", a-t-il déclaré.

La mère de Florence Cassez s'est déclarée "extrêmement triste, déçue, choquée". "On est reparti pour des mois" d'attente, a dit Charlotte Cassez. On ne peut pas lâcher l'espoir, on ne peut pas lâcher le combat". "C'est une profonde déception (...) après l'espoir suscité ces dernières semaines par les déclarations d'un des juges, qui pointait les errements de l'enquête", a réagi Martine Aubry, première secrétaire du PS et maire de Lille, ville natale de Florence Cassez.

Après six ans et trois mois de détention, l'enfer de la prison n'est donc pas terminé pour Florence Cassez. Son parcours judiciaire a débuté le 8 décembre 2005 lorsqu'elle a été interpellée à Mexico en compagnie de son ancien compagnon,Israel Vallarta, accusé d'être le chef d'une bande de kidnappeurs.

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